Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose,
En sa belle jeunesse, en sa première fleur;
Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur;
Quand l'aube de ses pleurs au point du jour l'arrose;
La grâce dans sa feuille, et l'amour se repose,
Embaumant les jardins et les arbres d'odeur;
Mais, battue ou de pluie, ou d'excessive ardeur;
Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose.
Ainsi en ta première et jeune nouveauté,
Quand la Terre et le Ciel honoraient ta beauté,
La Parque t'a tuée, et cendre tu reposes.
Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs,
Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs,
Afin que vif et mort ton corps ne soit que roses.
Pierre de Ronsard (1524-1585)
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